Les trois erreurs de pensée à l’origine de la peur de l’avion

Beaucoup de personnes ont peur des compagnies africaines, pensant le risque supérieur à un vol européen. Mais ce risque est-il intolérable ?

Beaucoup de personnes ont peur des compagnies africaines, pensant le risque supérieur à un vol européen. Mais ce risque est-il intolérable ?

Cette semaine, j’ai eu l’occasion de faire un entretien avec une dame qui souffrait d’une peur de l’avion assez forte. Elle arrivait encore à surpasser pour des voyages courts, mais une obligation professionnelle vers l’Asie lui posait des problèmes. Elle considère la sécurité comme quasi-totale en Europe grâce aux normes très élevées, mais comment être sure que les avions ne seront pas plus dangereux une fois sur place ? Voilà l’erreur de pensée : elle souhaitait obtenir l’assurance qu’elle aurait droit à une sécurité absolue, alors que cela n’existe tout simplement pas.Tout le monde connaît les statistiques : rien n’est aussi sécurisé qu’un trajet en avion. Rien. Être rationnel sur cette fiabilité ne change rien car on parle toujours de statistique : il y a moins d’un accident pour 10 millions de vols. Le problème resterait d’ailleurs le même si l’on n’avait qu’un accident pour 100 millions de vols, car on n’est pas à zéro. Lorsque l’on pense en « tout ou rien » face à une situation, même la meilleure statistique du monde n’est pas tolérable. La première étape est donc de comprendre qu’il n’existe pas de sécurité totale. Lorsque l’on vit, on prend un risque. Les personnes qui veulent réduire les risques évitent l’avion car il leur fait peur, puis les évitements peuvent parfois progresser et ce sont les trajets en voiture, l’ascenseur et toutes les activités qui deviennent difficiles, jusqu’à devenir parfois agoraphobe et rester enfermé chez soi. C’est par ailleurs une erreur d’un point de vue sécurité, car on compte plus de 20.000 victimes d’accidents domestiques chaque année en France… La recherche d’une sécurité absolue est donc la première erreur.

La méditation, la cohérence cardiaque, le yoga... autant de techniques de gestion de l'anxiété qui sont toujours bénéfiques !

La méditation, la cohérence cardiaque, le yoga… autant de techniques de gestion de l’anxiété qui sont toujours bénéfiques !

L’objectif est de savoir reconnaître que le risque est toujours relatif, qu’il faut utiliser notre raisonnement et non nos émotions pour guider nos actions. C’est l’un des concepts de la plaine conscience : nous devons accepter la situation telle qu’elle est, pas telle qu’on l’imagine. Le problème des personnes anxieuses est qu’elles cherchent à réprimer et éviter leurs émotions plutôt que de les constater. En avion comme lorsque l’on regarde un film d’horreur, on peut ressentir une peur intense sans avoir été mis en danger. La partie de notre cerveau qui gère notre stress, l’amygdale cérébrale, est partagée avec tous les animaux vertébrés à partir du petit lézard. La peur est une émotion automatique face à une situation, elle se déclenche de la même manière que le mouvement de la jambe quand un médecin teste nos réflexes avec un petit marteau. L’amygdale ne réfléchit pas, c’est votre cortex qui doit réaliser ce rôle.

La vraie difficulté est de réussir à ne pas donner de signification à un sentiment. L’erreur de raisonnement la plus fréquente est de penser que le sentiment de peur est un signe de danger. La peur n’est que de la peur. Le danger peut être identifié comme tel par votre raisonnement, par votre cortex qui est la partie « rationnelle » de votre cerveau. Si vous pouvez identifier l’origine de votre peur de l’avion, vous devez trouver une réponse rationnelle associée. Si vous avez par exemple peur d’une turbulence, vous devez comprendre pourquoi il n’y a aucun risque (savez-vous qu’on ne « tombe » par exemple que de quelques dizaines de centimètres ?). Il faut donc des réponses rationnelles pour se rassurer, mêmes si elles ne sont pas suffisantes.

Vous connaissez maintenant ces trois erreurs : la recherche de sécurité absolue, le refus des émotions, et la croyance que la peur implique un danger. La plupart des personnes essaient donc de se distraire ou d’éviter. On ne peut pas s’habiter avec ces méthodes. Il y a donc trois réponses :
– l’apaisement de l’amygdale cérébrale et la gestion de l’anxiété (par les techniques respiratoires comme la cohérence cardiaque) ,
– la mise en situation pour s’habituer à la situation et à ses émotions (en prenant l’avion ou dans les séances de simulateur de vol) ,
– trouver les réponses réalistes face à nos peurs, accepter cet infime risque pris en avion comme on le fait déjà dans tous les autres moments de la vie, puis garder le cortex allumé même dans les moments d’anxiété. C’est ainsi que l’on reste rationnel.

Le stage a été conçu pour répondre à cette triple problématique mais il n’est qu’une démarche. Il vous donne une impulsion dans le bon sens, il vous donne les réponses et le simulateur va vous marquer d’une manière positive, mais n’oubliez pas que c’est votre travail cognitif et votre entraînement aux techniques de gestion de l’anxiété qui vous permettront de faire disparaître la peur pour de bon. Et tout le monde en est capable  🙂

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À propos de Velina

Velina Negovanska, Psychologue Clinicienne, Docteur en Psychologie spécialisée dans le traitement des phobies et la gestion de l'anxiété. Formée aux thérapies cognitivo-comportementales à l'Association Française de Thérapie Comportementale et Cognitive, ainsi qu'à la cohérence cardiaque. Psychologue référent du Centre de Traitement de la Peur de l'Avion, Mail : psychologue[at]peuravion.fr
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5 réponses à Les trois erreurs de pensée à l’origine de la peur de l’avion

  1. scopelliti audrey dit :

    Je viens de lire cet article et je dois reconnaître qu’il est très intéressant et répond un petit peu à mon souci. Moi ma peur n’est pas irrationnelle, n’est pas climatique.
    1. je mets ma vie entre les mains d’un commandant de bord dont je ne sais rien. A-t-il des idées suicidaires?
    2.je mets ma vie entre les mains de tous ceux qui vérifient que tout est ok dans l ‘avion. Et s’ils avaient envie de saboter l’avion pour X raisons…Et les 50 fichés S qui travaillaient à l’aéroport Charles de Gaulle… Et s’il y avait une bombe dans l’avion?
    3. Et bien sûr le problème technique qui peut arriver n’importe quand.
    Après vient un point traité dans cet article: je me dis que je n’ai aucune obligation professionnelle de prendre l’avion donc c’est chercher les problèmes d’y aller de par moi même. Et j’ai l’impression de signer mon arrêt de mort si je dois dire oui à un voyage en avion. Je n’ai pas envie de faire deux orphelins…

    • Xavier dit :

      Bonjout Audrey,
      En réalité, par définition un phobie est toujours irrationnelle. Je pense que Velina a donné les exemples de la peur de l’avion liée aux éléments climatiques car c’est la plus fréquente, mais le principe est plus général. Quelle que soit l’origine de la pensée catastrophe (pilote, techniciens ,terroristes, pannes…), la pensée repose bien sur un scénario dont la probabilité peut être considérée comme inexistante (d’où les excellentes statistiques de la sécurité aérienne). La probabilité qu’un tel événement survienne est en tous cas bien plus faible que tous les risques que l’on prend chaque jour.
      Autrement dit : vos idées sont « réalistes » dans le sens où ces hypothèses existent, mais les procédures nous permettent de rendre le risque bien plus acceptable que de prendre par exemple sa voiture… D’où le besoin de revenir rationnel 🙂

    • Gjzhz dit :

      Mdr j’étais un peu rassurée par l’article… puis j’ai vu ce commentaire… un tas d’idées que je ne m’étais jamais faites… ma peur est multipliée par 3

  2. Grevin dit :

    Bonsoir,

    Pour ma part, je fais des crises d’angoisse et le fait de devoir prendre l’avion m’angoisse car j’ai peur de faire une crise de panique et devenir folle dans l’avion au point de vouloir ouvrir les portes de secours. Totalement irrationnel je sais mais cela m’angoisse car j’ai peur d’avoir une pulsion incontrôlable.
    Merci à vous pour vos conseils

    • Xavier dit :

      Bonjour,
      Vous souffre de ce que les psychologues appellent « la phobie d’impulsion », c’est-à-dire l’idée que l’on ne va plus se maîtriser et que l’on risque de faire des choses qui nous mettraient en danger, nous ou ceux qui nous entourent (sauter d’un télésiège, prendre un couteau et agresser quelqu’un…). Sachez que 99% de la population a ces mêmes pensées et que cela est donc normal, le passage à l’acte n’existant que chez les personnes ayant de vrais troubles psychiatriques.
      Côté technique, il faut également savoir que la porte ne peut pas s’ouvrir dans un avion : blindages + pression atmosphérique qui crée un effet bouchon + on doit pousser la porte vers l’extérieur et le vent nous en empêche (vous n’aurez pas la force d’aller contre un vent à 800 km/h !).
      La meilleure solution contre la phobie d’impulsion est le suivi avec un psychologue formé aux TCC, n’hésitez pas à contacter le Dr Negovanska au 06 80 08 63 73 si vous le souhaitez,
      Bons prochains vols !
      Xavier

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