Vers un nouveau record pour la sécurité aérienne en 2015 !

Vol Air FranceDans les années 80, la sécurité aérienne avait tellement progressé que l’on ne dénombrait plus qu’un accident mortel par million de vols réalisés. Boeing estimait alors que l’aviation civile était arrivée à son niveau de sécurité le plus élevé imaginable, et que le taux d’accidents ne pourrait plus être encore amélioré. Logiquement, l’accroissement du trafic aérien devait donc s’accompagner d’une augmentation parallèle du nombre des accidents, c’est à dire un doublement tous les 15 ans, et une projection catastrophique d’un accident chaque semaine aux alentours de 2020.

Sur le plan médiatique, des accidents aussi fréquents auraient fini par passer totalement inaperçus, un peu comme les 90 déraillements de trains ayant eu lieu cette année rien qu’en Europe… Bien heureusement c’est le phénomène inverse qui a été observé et nous battons chaque année le record de sécurité aérienne obtenu l’année précédente. Par exemple en 2015, on ne décompte plus que quatre accidents mortels* sur plus de 37 millions de vols réalisés. Paradoxalement, ce chiffre est si faible qu’il permet une couverture médiatique démesurée sur le moindre incident, même anodin, et un accident aérien provoquera 200 fois de bruit médiatique que tout autre type d’événement à nombre de mort égal, entretenant ainsi la peur de l’avion.

Revenons sur cette année 2015 à laquelle nous pouvons décerner une fois de plus le titre de « meilleure année de tous les temps dans le domaine de la sécurité aérienne ». Mais cette année a un goût tout particulier, les indicateurs étant réellement dans le vert, quelle que soit la statistique et la façon de mesurer. Ces quatre crashs méritent d’être détaillés :
– le 4 février, un ATR-72 de la compagnie TransAsia s’écrase à Taïwan suite à la mauvaise gestion d’une panne moteur par l’équipage. L’enquête révélera que les pilotes de la compagnie ne subissaient pas les entraînements réglementaires au simulateur de vol alors que cette panne était gérable, provoquant l’interdiction de prendre les commandes pour 29 pilotes du transporteur (53 passagers et 5 membres d’équipage, 43 morts),
– le 24 mars, un A320 de la compagnie Germanwings est projeté volontairement contre la montagne par son pilote (144 passagers et 6 membres d’équipages),
– le 16 août, un ATR-42 de Trigana Air s’écrase dans la province indonésienne de Papouasie. La compagnie était classée sur liste noire, il s’agissait de son 7ème accident en 20 ans (49 passagers et 5 membres d’équipage).
– le 31 octobre, un attentat détruit un Airbus de la compagnie russe Metrojet peu après son décollage de Charm el-Cheikh en Egypte (217 passagers et 7 membres d’équipage).

OLYMPUS DIGITAL CAMERAÉvidemment, 4 accidents qui provoquent la mort d’un peu moins de 500 personnes, cela fait toujours trop.  Mais il faut aussi savoir analyser froidement ces données et on ne peut être qu’optimiste pour l’avenir : les procédures mises en place permettront d’éviter que de telles situations se reproduisent. Les psychologues sont unanimes : la présence d’une hôtesse dans le cockpit du vol de la Germanwings aurait découragé Lubitz de mettre son avion en descente, et cette procédure est aujourd’hui appliquée systématiquement (voir cet article). L’attentat de Charm el-Cheikh a entraîné une prise en conscience mondiale et tous les aéroports desservant l’Europe vont devoir aligner leurs standards de sûreté aéroportuaire. Reste à appliquer les procédures réglementaires dans tous les pays du monde, c’est certainement ce qui prendra le plus de temps.

Si l’on considère maintenant la totalité de ce qui vole, c’est-à-dire en incluant les avions militaires, le trafic cargo, l’aviation de loisir et les petits jets privés de moins de 14 places, le bilan est tout aussi positif avec « seulement » 122 accidents à ce jour selon les données du Bureau d’Archives des Accidents d’Avions.

Bref, plus que jamais, nous nous rapprochons bel et bien du risque zéro pour le voyageur aérien, la fiabilité de l’aviation civile ayant atteint les 99,99999%… La probabilité de devenir millionnaire en jouant à l’Euromillion est ainsi devenue supérieur à celle de subir un crash aérien… Cet argument est certes trop rationnel pour faire disparaître la peur de l’avion, mais il s’agit d’une données supplémentaire révélatrice d’une simple réalité : quelle que soit l’activité considérée, des moyens de transport jusqu’aux loisirs, vous serez toujours plus en sécurité dans un avion.

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* La sécurité aérienne comptabilise les accidents survenus sur les avions commerciaux de transport de personnes de plus de 14 places.

Rappel des années précédentes :
– 2013 : sept accidents mortels avaient provoqué la mort de 165 passagers, pour plus de 3 milliards de personnes transportées. Le détail est ici.
– 2014 : à nouveau sept accidents mortels, mais sur 37 millions de vols, soit le taux le plus faible de toute l’histoire de l’aviation civile : moins d’un accident tous les 5 millions de vols. Détail à lire ici.

À propos de Xavier Tytelman

Ancien aviateur militaire aujourd'hui consultant sur les questions aéronautiques. Responsable et formateur au Centre de Traitement de la Peur de l'Avion (www.peuravion.fr). Tel : +33667484745
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